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“La CEDEAO fait une diplomatie d’épouvantail militaire” : Le Professeur Nassirou Bako Arifari révèle les limites de la diplomatie régionale

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À l’occasion de la célébration des 49 ans d’existence de la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), le professeur Nassirou Bako Arifari, député béninois au Parlement ouest-africain de l’organisation régionale, a mis au jour les limites que connaît la diplomatie actuelle de la CEDEAO face aux défis politiques qui touchent l’organisation.

Lors de sa conférence inaugurale sur le thème : « La CEDEAO des États et des peuples : un chantier en construction à la croisée des chemins », le professeur Nassirou Bako Arifari a exposé l’inefficacité du système politico-diplomatique de l’organisation régionale face aux défis contemporains, notamment les coups de force politiques qui ont vu le retour au pouvoir des militaires dans des pays comme le Mali, le Burkina Faso, la Guinée Conakry et le Niger.

« Face aux stratégies d’endiguement des processus de démocratisation sur le continent africain, (…) je constate une offre de leadership faible à un moment historique et crucial pour la préservation de la paix et de la stabilité dans la sous-région », a déclaré l’ancien ministre des Affaires étrangères du Bénin le jeudi 30 mai 2024, à l’Université d’Abomey-Calavi.

Une diplomatie en perte de vitesse

Selon l’universitaire, l’approche de gestion des problèmes politiques au sein des États est basée sur une diplomatie en perte de vitesse. « Partout où il y a coup d’État, on propose un gouvernement de transition, un conseil national de transition qui fait office de Parlement. On organise des élections et, lorsqu’on a fini les élections, on pense donc qu’on a résolu la crise et on passe à autre chose. C’est le même traitement unique et on refuse d’aller en profondeur sur les problèmes que les États connaissent. (…) C’est vrai que nous avons un protocole sur les sanctions, mais le protocole n’a jamais prévu une coordination CEDEAO-UEMOA dans la prise des sanctions, notamment financières, contre les États. (…) Et on a ajouté une sanction qui n’était ou qui n’est pas dans la liste des sanctions : c’est la fermeture des frontières.», a-t-il souligné.

Limites de la menace d’intervention militaire

Au sujet de la menace d’intervention militaire pour rétablir l’ordre constitutionnel, le professeur Nassirou Bako Arifari a indiqué que « lorsqu’il s’agit de petits pays, on a vu, en Sierra Leone, un coup d’État, et on a ramené le président, en Gambie, oui, on a ramené le président. Mais, on voit les limites de cette diplomatie d’épouvantail militaire lorsqu’il s’agit de pays à puissance moyenne, et le cas du Niger que nous connaissons aujourd’hui nous informe sur les limites d’une telle approche. (…) Qui peut oser intervenir au Nigeria en cas de coup d’État ? Cela veut donc dire que la stratégie ou la diplomatie de l’épouvantail militaire a beaucoup de limites et doit être revue d’une manière ou d’une autre.»

Retard dans la réponse aux crises sécuritaires

Pour le parlementaire, la CEDEAO est en perte de vitesse sur plusieurs fronts. Elle n’a pas encore réussi à réadapter sa stratégie de prévention pour répondre aux crises sécuritaires telles que l’extrémisme violent et le terrorisme qui touchent la plupart de ses États membres. « La perception dans le contexte actuel est une perception de type négatif. (…) La stratégie communautaire de lutte contre le terrorisme n’a pu être finalisée qu’en 2021 ou 2022, pendant que des États s’étaient déjà presque écroulés. (…) Les États les plus exposés, le Niger, le Burkina Faso, le Mali, bien entendu membres de la CEDEAO, peinaient à obtenir une contribution de la CEDEAO. Ce n’est qu’en 2023 que la CEDEAO a décidé d’accorder, je pense, environ 1 milliard de FCFA à chacun de ces pays dans le cadre de la lutte contre le terrorisme. Ce déficit de solidarité à un moment crucial a été fatal, d’un point de vue, pour notre organisation.», a-t-il fait savoir.

La CEDEAO, une victime collatérale

Si l’organisation économique régionale est confrontée à plusieurs difficultés, l’ex-chef de la diplomatie béninoise rappelle que la CEDEAO a été victime de nombreux maux qui ont terni son image. « La CEDEAO est victime de l’insécurité et du terrorisme, qui sont des effets collatéraux de conflits géostratégiques liés à des intérêts nationaux hors du continent africain. La destruction de la Libye, le printemps arabe et toute la dynamique actuelle d’endiguement de l’expansion du processus de démocratisation sur le continent et au-delà du continent. (…) Il y a [aussi] une certaine préférence pour le régime autoritaire dont le modèle est en train de se répandre.», a-t-il rappelé.

Philippe G. LOKONON

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