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Une Française Bordelaise réinvente le Sodabi au cœur du Bénin : rencontre avec la Distillerie des Cauris à Ouidah

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C’est une histoire de passion et de découverte qui lie une Bordelaise au Bénin, un pays qui l’a charmée dès son premier voyage. Diplômée en œnologie et en biologie végétale, avec une formation en composition et analyse des parfums, arômes et distillation des spiritueux, cette experte a rapidement été séduite par la richesse culturelle du Bénin et son accueil chaleureux.

Ici, la Distillerie des Cauris de Ouidah

Lors de son voyage inaugural au Bénin, une œnologue découvre le Sodabi, une eau-de-vie traditionnelle issue de la fermentation et de la distillation de la sève de palmier. Souvent offerte en signe d’hospitalité, cette boisson pourrait être comparée aux Armagnac ou Cognac de sa région d’origine. Cependant, elle note rapidement plusieurs défauts qui ne passent pas inaperçus aux yeux de cette professionnelle. Convaincue de redonner au Sodabi ses lettres de noblesse, elle décide de lancer son projet à Ouidah, ville située à quelques kilomètres de Cotonou, la capitale économique du Bénin. Le journal Lameteo s’est rendu sur place pour découvrir la production artisanale en petites séries du Sodabi, désormais connu sous le nom de Distillerie des Cauris. C’est son ami, Vincent Harisdo, danseur, chorégraphe et pédagogue béninois de renommée internationale, qui présente cette initiative.

Lameteo : Pouvez-vous nous présenter ce projet ?

Vincent Harisdo : Le projet s’appelle la Distillerie des Cauris. J’ai eu beaucoup d’hésitations à accepter que ce projet s’installe ici, dans un centre culturel ( CDAC, Centre de Développement Artistique et Culturel Ndlr ), mais c’est la vision derrière ce projet qui nous a intéressés. La personne à l’origine de ce projet a été très choquée par la nocivité du produit que consomment les gens ici. C’est une femme qui est œnologue.

LIRE AUSSI : Vincent Harisdo, le danseur béninois qui réinvente la danse contemporaine africaine : “Je travaille à reproduire les danses d’Afrique pour en faire une danse de spectacle”

C’est un travail de chimiste qui analyse les produits. Quand elle est venue au Bénin dans le cadre d’un stage de danse, en goûtant ce produit et en le ramenant en France pour l’analyser, elle s’est rendue compte que ce produit, consommé au Bénin, est très nocif: le manque de matériel fiable et de rigueur scientifique conduisent à la production d’un Sodabi au taux d’alcool non maîtrisé, contenant des composés toxiques comme le méthanol ou des métaux lourds qui peuvent avoir des conséquences désastreuses sur la santé des consommateurs.

Vincent Harisdo au micro de Lameteo

Elle a donc voulu proposer un produit basé sur la tradition, ce qui rejoint également le projet que nous menons en danse. Il s’agit d’aller chercher du vin de palme dans les campagnes et de proposer une méthode de distillation propre. C’est assez paradoxal de parler d’un alcool propre, mais c’est un alcool dont la production est maîtrisée, tout comme son contenu. Son idée est de former les Béninois à fabriquer ce produit de manière propre et correcte. Nous avons donc accepté cette production artisanale, reposant sur un projet d’hygiène et de santé publique. Nous sommes dans un village où, il ne faut pas se mentir, beaucoup de gens consomment cet alcool. Donc, si nous pouvons les aider à prendre conscience de l’importance de consommer quelque chose de propre et de ne pas boire de manière excessive, mais plutôt réfléchie, comme un alcool de luxe où l’on boit pour déguster, c’est pour cela que nous avons eu envie d’accueillir ce produit ici. Elle propose un produit qui permet aux gens de retrouver le plaisir de boire, et non plus la nécessité de boire.

Vous transmettez les pas de danse et les manières de danser. A-t-elle également en projet de transmettre cette technicité de la préparation du Sodabi pour qu’il ne soit pas nocif pour la santé ?

Absolument. Son projet est de créer un centre d’apprentissage de la distillation. Bien qu’elle ne soit pas là en ce moment, le projet est en cours avec deux ou trois jeunes de Ouidah qui s’en occupent. Ils ont travaillé à ses côtés et maîtrisent complètement le système de fabrication. Pour l’instant, ils utilisent son matériel parce qu’ils n’ont pas encore les moyens d’en acquérir, donc elle a mis à leur disposition ses équipements pour qu’ils puissent continuer la production. Son objectif est de développer ce concept dans différents centres et villages, afin de créer un collectif de producteurs qui fabriqueront ce produit et le distribueront à travers le monde.

Le dispositif de production

Est-ce que le produit est déjà en vente ?

Le produit est en vente dans divers hôtels à Ouidah. Bientôt, on le trouvera à Erevan à Cotonou, au Code Bar. Pour l’instant, nous ne souhaitons pas diffuser largement ce produit, mais plutôt en faire un produit intimiste, où les gens viennent chercher quelque chose de spécial pour découvrir le goût authentique du vin de palme du Bénin.

Venance TONONGBE & Raïssa NOUGBODOHOUE


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