Alors que les fameux accords de Bretton Woods – signés à l’été 44 et qui maintiennent l’Afrique en général et celle francophone en particulier dans une dépendance endémique vis-à-vis de l’occident – semblent décliner au profit d’une indépendance monétaire de la zone Franc, certains chefs d’Etat de ladite zone semblent toujours préférer le statu quo de la servitude du franc Cfa. Les espoirs nés de l’annonce d’une monnaie commune pour les pays de la Cedeao ont tôt fait de retomber quand dans l’opinion publique africaine, s’est divulguée la nouvelle du maintien de l’arrimage de cette future monnaie avec l’Euro.
Ainsi, l’Eco, c’est le nom de cette nouvelle monnaie, annoncée avec tintamarre comme un nouvel outil d’émancipation de la tutelle monétaire française ne sera qu’un cfa bis qui perpétuera la dépendance des Etats de l’Uemoa et de la Cemac vis-à-vis de la France. Mieux, la nouvelle monnaie qui ne fait plus l’unanimité dans le rang des dirigeants Ouest africains notamment les anglophones qui refusent ce sabordage avec la France, porte les germes d’une dévaluation. Aussi tristes qu’elles puissent paraître, ces deux informations dont les défenseurs acharnés se font l’écho par médias interposés donnent à réfléchir quant au sens du patriotisme des gouvernants africains. Il est tout simplement inadmissible que pour une fois où s’offrent aux Africains, la possibilité de sortir du cercle vicieux de la monnaie, des chefs d’Etat mus par des intérêts dont ils sont les seuls à connaître les tenants et aboutissants, continuent à cautionner la servitude au lieu de s’inscrire dans la dynamique de l’émancipation définitive. Même si les ardents défenseurs du franc cfa restent convaincus que cette monnaie n’est nullement à la base du sous développement des pays qui l’utilisent, il est établi qu’il y contribue à bien des égards. Les inimitiés que se font les élites et intellectuels africains pourfendeurs de cette monnaie en disent long sur les non dits de ses impacts sur le développement des Etats concernés.
Et quand le cercle des férus de cette monnaie ne se réduit qu’à deux personnes qui semblent visiblement vouloir se battre contre tous pour maintenir le franc cfa sous le couvert d’un Eco supposé nouveau , on comprend mieux que ce ne sont plus véritablement les intérêts des peuples qui sont effectivement visés mais plutôt ceux de potentats occidentaux dont les valets ne se cachent plus de ces liaisons dangereuses. Seulement, dans un environnement mondial de plus en plus hostile à l’aliénation de la souveraineté des peuples et des, ces inconditionnels de la France doivent commencer à réviser leur position sur ces questions engageant la souveraineté des Etats. Si un projet de loi sur l’extradition de prisonniers vers la Chine a pu sortir les Hong Kongais de leurs gonds, il faut s’attendre à ce que par ici également, ces mauvais choix sur des questions de souveraineté aussi sensibles que celle de la monnaie puissent devenir dans les mois, les année à venir, la goutte d’eau qui fera déborder le vase de la colère et de l’indignation grandissantes sur le continent.
Prévenir le mal en faisant des options qui favoriseraient plutôt l’émergence des populations longtemps affligées par les aléas du franc cfa s’avère donc impérieux pour ces chefs d’Etat au service d’une France qui entend perpétuer contre vents et marées, les termes des accords secrets scellés dans le cadre des indépendances. La ferveur des soulèvements n’est pas encore tombée en Algérie et le Soudan tanguent encore au rythme de la colère de populations meurtries par des années de dictature et de servitude affligeantes. Alors, il faudra veiller à ce que les échos indignent et révoltants qui sourdent de la naissance de l’Eco soient à l’arrivée démentis par les réalités de sa mise en oeuvre. Autrement, l’accueil qui sera à elle réservé risque d’être à l’image des printemps arabes qui font encore des vagues.
Raoul HOUNTONDJI