Le Conseil des ministres de ce mercredi 13 novembre 2019 a relevé plusieurs irrégularités dans la Convention signée en 2009 entre l’Etat du Bénin et la Société nouvelle de cimenterie du Bénin (Nocibe), sous la gouvernance de l’ancien président de la République, Boni Yayi. Et il annonce la révision de certains points de la Convention à travers un accord de signature d’un avenant entre les deux parties. Ce faisant, le gouvernement de Patrice Talon remet en cause une convention perçue à l’époque comme un crime économique, signée par les anciens ministres Irénée Koupaki, Soulé Mana Lawani, Barthélémy Kassa, Grégoire Akofodji et Christine Ouinsavi. Retour sur la Convention controversée aux allures de scandale d’Etat.
Aux lendemains de la signature de la convention d’exploitation du gisement cimentier de Adja-Ouèré entre L’État du Bénin et la Nouvelle cimenterie du Bénin (Nocibe), la presse béninoise et des députés avaient mis à nu des points de ladite convention jugés scandaleux. Cette convention avait été signée en mai 2009 par quatre ministres du président Boni Yayi. Ce sont Pascal Irénée Koupaki, Soulé Mana Lawani, Barthélémy Kassa, Grégoire Akofodji et Christine Ouinsavi, à l’époque des faits, respectivement ministre d’Etat chargé de la Prospective, du Développement et de l’Evaluation de l’Action publique, ministre de l’Economie et des Finances, Ministre de l’Industrie et ministre du Commerce. Deux points majeurs faisaient scandale.
20 ans d’exonérations !
Primo, dans la convention, l’Etat béninois a accordé des exonérations fiscales et douanières à la société Nocibe pendant vingt ans. De façon précise, la société Nocibe est exonérée sur tous les impôts et taxes pendant quinze ans durant la phase d’exploitation des gisements et cinq ans durant la phase d’installation donc exploite gratuitement le sous sol béninois. C’est ce que disent ces extraits de la convention en l’article 4.4.2.2 : « Pendant les quinze premières années de la période d’exploitation, la première année commençant le 1er janvier de l’année qui suit la mise en exploitation, la Société, ainsi que celle qui opérera la centrale électrique bénéficieront d’une exonération totale : de toutes les taxes sur le chiffre d’affaires ou taxes assimilés, taxe sur la valeur ajoutée, de tous les prélèvements sociaux autres que ceux destinées à la caisse de retraite et à l’assurance maladie, ou parafiscaux de quelque nature que ce soit perçus au profit de l’Etat ou tous les organismes et collectivités publics, et exigibles sur tous biens, produits, marchandises, contributions, prêts, services reçus ou acquis par la Société, ou à elle rendus, ou qu’elle se livrerait à elle-même dans la mesure où ces taxes se rapportent directement ou indirectement à des opérations de la Société… de l’impôt sur les bénéfices industriels et commerciaux, y compris de l’impôt minimum forfaitaire ; de la patente, des contributions foncières des propriétés bâties ou non bâties, de la taxe de voirie, de la taxe d’enlèvement des ordures ménagères, et de toutes taxes annexes ; du versement patronal sur les salaires ; de la taxe sur les véhicules de sociétés… de l’impôt sur le revenu des valeurs mobilières pour tous les revenus versés par la Société à ses actionnaires et administrateurs…des impôts et taxes sur les activités financières et de tous droits et taxes sur les transferts de fonds et hors l’Uemoa… ». Mieux, la convention élargie ces exonérations aux sociétés prestataires de la Nocibe. En témoigne l’article 4.4.1.2. : « toutes les personnes physiques ou morales, locales ou étrangères, notamment les contractants, sous contractants, sous-traitants, prestataires travaillant pour son compte » et l’article
4.4.2.2 de préciser : « …En outre, et, pendant toute la durée de la présente convention, la Société pourra déduire de sa base imposable à l’impôt sur les Bic, tous les montants réinvestis dans le cadre d’extension ou d’amélioration de la productivité y compris les participants au capital de toutes nouvelles sociétés ayant une activité quelconque du Bénin et dans les pays de l’Uemoa et de la Cedeao… ».
2000 hectares à exploiter !
Secundo, l’étendue de l’espace à exploiter est jugée incroyable. 2000 hectares ! C’est ce que révèle l’article 3 de la convention minière au point 3.2 portant sur la description des concessions : «Les concessions de calcaire, d’argile et de latérite, objets de la présente convention, sont localisées dans les Communes d’Adja-Ouèrè, de Pobè et de Kétou, département du Plateau. La superficie globale des concessions sera à 2.000 hectares (ha). Les deux premières concessions dont la superficie totale est de 811 ha sont définies à l’annexe n°-1. L’Etat s’engage à accorder de nouveaux permis de recherche dans le prolongement vers Onigbolo en vue d’attribuer de nouvelles concessions à la société.»
Aujourd’hui, des années après de la signature de cette convention, le Conseil des ministres présidé par le président Patrice Talon a souligné des irrégularités en sept points et conclut: « l’examen de ladite convention a en effet révélé que certains avantages octroyés à la société sont soit excessifs, soit contraires à des dispositions légales, réglementaires et communautaires, voire internationales ». C’est pourquoi depuis 2016, l’État a engagé des négociations avec la société Nocibe afin de réviser la convention, précise le Conseil des ministres.