L’approche de l’église catholique romaine du Bénin vis-à-vis du nouveau code électoral adopté en vue des élections générales de 2026 suscite des critiques au sein de la classe politique et au niveau de plusieurs autres confessions religieuses, qui la semaine dernière, ont pris position dans une déclaration commune. Le Père Rodrigue Gbédjinou, prêtre du diocèse de Cotonou, répond à ces critiques dans un entretien accordé à Lameteo.
Au lendemain du colloque organisé par l’Observatoire chrétien catholique de la gouvernance (OCCG), sous la houlette de la Conférence des évêques du Bénin, le 25 avril 2024, des politiques et religieux ont dénoncé la démarche utilisée par le clergé catholique pour intervenir sur le code électoral, un sujet sensible. Certains ont même évoqué une position de l’église catholique qui serait plus proche de celle de l’opposition dans cette affaire. Dans un entretien exclusif accordé à Lameteo, le Père Rodrigue Gbédjinou, directeur de l’École d’initiation théologique et pastorale (EITP), lève l’équivoque sur la polémique suscitée par le colloque et la position supposée de l’église catholique dans ce dossier.
La position de l’église catholique
En ce qui concerne le code électoral, le prêtre a indiqué qu’à ce jour, « l’église n’a pas encore donné son point de vue » et qu’aucune déclaration officielle de l’église catholique n’a émané du clergé à ce sujet. Il fait savoir que le colloque organisé le 25 avril dernier est une approche des ecclésiastiques pour “se faire éclairer”. « L’église aussi s’informe parce que dans ce même pays, il y a eu des déclarations et on dit que l’église répercute ce que les gens disent dans la rue. (…) On a eu recours à des experts. Voici le document qui crée des différends, étudions-le, étudiez-le pour nous, parlez-nous-en », a expliqué le directeur de l’EITP.
Le clerc spécialiste des rapports Église et État fait savoir que l’église catholique essuie des critiques car elle attaque un point sensible qui menace les intérêts des uns et des autres. « Tous les régimes (politiques, Ndlr) accusent toujours l’église catholique quand elle prend position dans un dossier ou qu’elle appelle à la conscience, à la raison droite. Quand elle demande qu’il y ait des approches plus rationnelles pour le vivre-ensemble, celui qui se sent désavantagé et qui avait déjà fondé son succès ou ses intérêts sur cela crie haro sur le baudet », a-t-il rappelé.
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« Il y a eu des déclarations qui disent qu’après le vote de la loi, les gens mécontents sont allés voir le clergé et c’est comme si le clergé a pris parti. Mais il y a des gens de la mouvance qui sont venus voir le clergé. Ils sont allés voir les évêques pour expliquer aussi pourquoi ils ont fait ça. Mais, on ne relève pas cela. », a déploré le Père Gbédjinou.
Rôle de l’église
Pour le prêtre, auteur de plusieurs livres notamment sur les rapports Église et État, l’église catholique est dans son rôle de « mère et maîtresse » et à ce titre, elle se doit d’« affiner les pédagogies ». « Dans cette église-là, il y a les hommes de tous les partis politiques. (…) Quand deux de tes fils ont des problèmes, l’un vient se plaindre et l’autre aussi se plaindre, mais tu essaies de chercher quel est le fond du problème et c’est en fonction de ça que tu peux faire des recommandations à l’un ou à l’autre », a-t-il démontré.
Dans une déclaration en date du 30 avril 2024, cinq Eglises chrétiennes d’obédience protestante et évangélique ont pris position contre l’église catholique rappelant à cette dernière que le rôle des Églises et des institutions religieuses doit être d’influencer positivement les dirigeants politiques et les organes chargés d’organiser les élections, en les guidant vers des décisions justes, équitables et sages. Car, “il n’y a pas de loi parfaite ; et l’utilité d’une loi ne vaut que par la qualité et le bon sens des instances chargées de son application.”