Alors qu’il croupit à la Maison d’Arrêt et de Correction de l’Armée (Maca) du Burkina Faso pour tentative de coup d’Etat, Djibril Bassolé est gravement malade et demande à être évacué sur l’extérieur. Les images de lui qui circulent sur la toile montrent l’ancien ministre des affaires étrangères de Blaise Compaoré sérieusement en baisse de forme et visiblement souffrant. Maladie réelle ou effets du stress généré par son incarcération? Seul un médecin pourra y répondre objectivement, après examen bien sûr.
Seulement, on est droit de se demander pourquoi ses proches et lui tiennent à ce qu’il soit forcément évacué sur l’extérieur. N’est-il pas possible qu’il se fasse soigner au Burkina Faso?
La qualité des soins y est-elle aussi piètre au point où ce soit forcément en Europe qu’il veuille aller se faire soigner? La réponse à cette série de questions révèle un véritable problème de gouvernance des pays africains notamment en ce qui concerne la qualité des soins. Il est inadmissible qu’après avoir collaboré avec un régime qui a gouverné un pays pendant plus de 27 ans, on ne fasse pas confiance au système sanitaire de ce pays. En cadre honnête et fier d’avoir contribué qualitativement à l’avancée de son pays, Bassolé devrait accepter se faire soigner dans les hôpitaux de réference de son pays, au même titre que ses compatriotes. Autrement, soit il est conscient de la mauvaise qualité des soins de santé dans son pays, soit il voudrait profiter de l’évacuation sanitaire pour se soustraire à la justice de son pays. Dans l’un ou l’autre des deux cas, on en déduit que cette volonté nettement affichée de Djibril Bassolé d’aller se faire traiter à l’extérieur est une insulte aux Burkinabés lambda qui, incapables de se faire évacuer sanitairement, meurent dans les hôpitaux locaux du fait de la mauvaise qualité des soins.
Le cas Bassolé rappelle bien d’autres cas de caciques des pouvoirs africains déchus. Une fois dans cette position et surtout confrontés à la justice, ils prétextent de la dégradation de leur santé pour s’exiler afin de ne pas répondre de leurs crimes commis pendant l’exercice du pouvoir. Ce qui est bien malhonnête car cet état de chose perpétue les pratiques de mauvaise gouvernance et de dilapidation des ressources de l’État. Il est bien facile de parler de chasse aux sorcières ou de règlement de compte quand des personnes qui ont précédemment exercé le pouvoir d’État se retrouvent dans les mailles de la justice. Mais quand les faits sont établis, justice doit être faite pour le bonheur des populations.
Plutôt que de militer en faveur de ces évacuations sanitaires, la sociétés civiles et les organisations de défense des droits de l’homme doivent, en amont, s’investir auprès des gouvernants pour l’amélioration de la qualité des soins et du plateau technique dans les États africains. Une fois cela acquis, les évacuations sanitaires ne seront plus nécessaires. Sinon que cela donne l’impression qu’il y a des citoyens de seconde zone qui n’y ont pas droit et d’autres, de première zone, qui peuvent en bénéficier comme bon leur semble. C’est une injustice sociale qui doit cesser.
Le cas Djibril Bassolé doit donc faire école en Afrique afin que cessent ces évacuations sanitaires visant plutôt, sinon le plus souvent, à se soustraire à la justice de son pays après avoir commis des crimes avérés.