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Evolution de l’Etat au Bénin [Chronique Roger Gbégnonvi]

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Dans son interview à Jeune Afrique (N° 3093, octobre 2020, p. 50), le Chef de l’Etat déclare : « Tout le monde ne peut pas profiter de la croissance le même jour et au même moment, mais le rôle d’une bonne gouvernance est de faire en sorte que la dynamique globale, les règles de fonctionnement et l’environnement économique soient de nature à favoriser le potentiel de chacun. C’est ce que nous faisons, avec un objectif précis : promouvoir la création de richesse pour générer des emplois. »
C’est la grammaire sociale de l’Etat libéral, Etat qui est le choix du Bénin depuis 1990, après 15 années d’une tentative d’Etat totalitaire, dont nous pensions qu’il nous guérirait d’être l’« enfant malade de l’Afrique » et qui, hélas, a renforcé le mal. Remède calamiteux. Dans son livre-témoignage paru en 2018, Adrien Ahanhanzo Glèlè dit quelle fut la nuit de l’Etat totalitaire sous le Parti de la Révolution Populaire du Bénin : « Le Bénin a connu le plus grand désastre politique, humain, économique, social, spirituel-même de toute son histoire. » Cet ingénieur agronome, ancien ministre, a été « condamné à mort, sans jamais comparaître, et sans que qui ce soit m’eût informé de quelque délit que ce soit par un tribunal anonyme et sans visage ». Avec d’autres envoyés à la mort hors de tout procès, il passera dix ans en prison sans que la peine capitale n’ait jamais été officiellement commuée. Car l’Etat totalitaire c’est l’Etat arbitraire, à l’intérieur duquel des apparatchiks s’occupent à bien vivre en ayant livré le peuple au mal-vivre des lendemains qui vont chanter. Le peuple béninois a rejeté le cynisme politique qui l’a conduit dans le mur. Il a fait le choix de l’Etat libéral en vue de « favoriser le potentiel de chacun » pour le progrès de tous.

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Or ni sinécure ni panacée, l’Etat libéral exige l’effort permanent et répond au sombre et inusable aphorisme de Sir Winston Churchill : « La démocratie est le pire des systèmes à l’exclusion de tous les autres. » Si l’Etat totalitaire est une forêt de cactus géants qu’il faut fuir à toutes jambes, l’Etat libéral s’apparente à une épaisse broussaille qu’il faut aborder toujours avec lampe et serpe pour dégager le chemin. Au Bénin, lampe et serpe sont l’Article 8 de la Constitution du 11 décembre 1990 : « La personne humaine est sacrée et inviolable.- L’Etat a l’obligation absolue de la respecter et de la protéger. Il lui garantit un plein épanouissement. A cet effet, il assure à ses citoyens l’égal accès à la santé, à l’éducation, à la culture, à l’information, à la formation professionnelle et à l’emploi. » Article inchangé après la retouche constitutionnelle du 7 novembre 2019. La tâche à faire est énoncée. Tâche de longue haleine sur un chemin de longue patience : le « plein épanouissement » des citoyens
Depuis 30 ans, avec des hauts et des bas, l’Etat libéral au Bénin s’attelle à accomplir le « plein épanouissement » des citoyens. Ici n’est pas le lieu d’établir la somme des centres de santé, des lieux d’étude et de formation, des kilomètres de route tracés, des fenêtres ouvertes sur la liberté de presse, etc., proposés et mis à la disposition des citoyens, avec leur concours, pour leur « plein épanouissement ». Une tâche difficile dans le contexte d’une croissance démographique dont il faut bien dire qu’elle est galopante et que l’Etat libéral, au contraire de l’Etat totalitaire, ne peut pas contrôler par décret. Nous serons donc toujours enclins à voir ‘‘tout ce qui manque’’ parce que tout ce qui a été ajouté a été aussitôt absorbé par une espèce de ‘‘trop plein de population’’. C’est le syndrome du tonneau des Danaïdes.
Mais ne nous tentera plus le leurre de l’Etat totalitaire qui musèle et impose l’illusion du « tout va bien, Madame la Marquise ». Nous préférons désormais « la vérité, l’âpre vérité » de l’Etat libéral et démocratique qui, par essence, veut la participation de tous. Prenons notre place dans la cordée pour le progrès de l’homme ici et maintenant au Bénin.

Roger GBÉGNONVI

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