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Pédophilie, racisme…quand le Nègre est par tous crucifié

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Au sortir d’un entretien avec le président Soglo, on est forcément bouleversé. Tout le temps de la conversation, on a été confronté aux ombres hurlantes de Nègres enchaînés, pendus, empalés. On a parfois baissé le regard pour apaiser les sens. Horreurs en série. Il en a tapissé les murs de son bureau pour se souvenir, pour qu’on se souvienne. Il sait en effet qu’au contraire des Juifs, l’holocauste des Nègres n’émeut pas les éditeurs et pas les cinéastes. Nul n’imagine Hollywood en tirer de temps en temps un grand film á haute teneur de thrillers pour tenir le monde en haleine afin qu’il n’oublie pas et ne recommence pas. Un Nègre, ce n’est qu’un Nègre, et sa crucifixion peut se poursuivre. Et le président Soglo, féru d’histoire, connaît le propos de son illustre collègue, l’humaniste François Mitterrand : ‘‘Un génocide dans ces pays-là, c’est pas trop important.’’ Il parlait du Rwanda en 1994. Et voici qu’en l’an de grâce 2018, émigrant vers l’Europe, des Nègres nombreux sont vendus comme esclaves en Libye, vendus comme du temps des Nègres martyrisés sur les murs du bureau du président Soglo. Quant aux migrants réchappés à l’esclavage en Libye et à la mort en Méditerranée, le Rassemblement National leur interdit le sol français : ‘‘Il faut les renvoyer chez eux’’. Ô très bonne Marine Le Pen, ta belle France s’en va pâlir si les Nègres, sans l’en prévenir, cessent de l’aimer, elle s’en va s’effondrer s’ils décrochent, sans préavis, de son franc des Colonies Françaises d’Afrique. Ils aborderont donc avec précaution le désamour de la France et l’abandon du franc CFA, parce qu’il leur tient à cœur que la France reste debout.
Dans un livre-manifeste, ‘‘Comment je suis redevenu Africain’’, un Béninois de 63 ans confie avec gravité : ‘‘C’est l’un de mes éducateurs au séminaire, le très révérend Père [un missionnaire français] qui m’a sodomisé à plusieurs reprises. Cela s’est passé en 1963-1964, j’avais treize ans et j’étais en classe de sixième ! Il m’a dit que ce n’était pas un péché du moment que lui était prêtre… Je ne l’ai pas cru.’’ Et le sentiment de culpabilité lui pesait. Il s’en libère dans un livre 50 ans plus tard. Or sa confession n’a pas troublé le milieu clérical béninois. Pas d’enquête pour savoir si le crime de lèse-innocence n’était pas commis avec constance dans les séminaires et internats régis par les bons pères. C’est que la victime n’est qu’un Nègre. Eût-elle été un Américain, un Français, un Irlandais, alors branlebas dans les bénitiers pour donner la chasse à d’autres éducateurs soignant leur souffrance intime par la pollution de la candeur des petits garçons. Procès devant les tribunaux laïcs et religieux. Quelque évêque invité à la démission pour avoir protégé ses prêtres éperdus de solitude. Mais un éducateur français qui saccage un petit Nègre dahoméen, bof ! Ils sont faits pour ça.
La crucifixion du petit Nègre ne suscite que bof parce qu’il habite le continent dont Donald Trump a dit qu’il est fait de pays de…, de pays scatologiques, pour employer un mot un peu moins sale que le sien. Aucune agitation suite à ce baptême putride du continent noir. Nul ambassadeur accrédité à Washington n’a été ‘‘rappelé en consultation’’ pour stigmatiser l’injure à continent. C’est qu’il ne s’agit pas des Arabes, des Asiatiques, des Européens, des Israéliens, il s’agit des Nègres. Dans leur cas, ‘‘autant en emporte le vent’’.
Crucifié par tous à tous les vents, le Nègre se laisse amuser par Senghor : ‘‘Nous sommes les hommes de la danse dont les pieds reprennent vigueur en frappant le sol dur.’’ Il s’éclate devant Beaumarchais : ‘‘Qui t’a donné une philosophie aussi gaie ? – L’habitude du malheur.’’ Mais il entend Alfred de Vigny : ‘‘Si le Ciel nous laissa comme un monde avorté, / Le juste opposera le dédain à l’absence / Et ne répondra plus que par un froid silence / Au silence éternel de la Divinité.’’ Et il écoute la femme de Job : ‘‘Maudis donc Dieu et meurs !’’ Et il s’écrie lui aussi avec le Christ : ‘‘Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ?’’

Roger Gbégnonvi


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