La décision du gouvernement béninois de suspendre l’évacuation du pétrole nigérien via le terminal du pipeline à Sèmè-Podji fait polémique depuis son adoption le lundi 6 mai dernier. Une mesure prise en réponse à la fermeture des frontières par Niamey qui trouve son fondement dans le droit international public, selon le Professeur Victor Topanou, ancien ministre de la Justice sous l’ex chef d’Etat, Boni Yayi et aujourd’hui député à l’Assemblée nationale.
Dans une entrevue diffusée par Canal 3 Bénin le mardi 13 mai, le Professeur Victor Topanou a démontré les fondements juridiques qui justifient la décision de suspension de l’embarquement du pétrole nigérien dans les eaux territoriales béninoises via la plateforme pétrolière de Sèmè-Podji. En effet, le Professeur Topanou a affirmé avoir lu les discussions et les commentaires circulant actuellement, notamment sur l’existence d’un accord entre le Bénin et une clause de l’article 3 interdisant certains actes.
Il a confirmé que cette affirmation est vraie. Mais, l’ancien ministre de la Justice a ajouté que l’acte posé par le Président Talon repose sur un fondement juridique solide. Selon lui, le chef de l’État Patrice Talon a appliqué les “contre-mesures” vis-à-vis du Niger. Une disposition prévue par le droit international permet « à un État A de prendre des mesures pour obliger un État B, qui lui-même a pris des mesures en violation du droit international, pour le ramener à respecter le droit international ».
Un fait qu’il rapporte à la tension actuelle entre Cotonou et Niamey. « À l’évidence, le maintien des frontières du Niger fermées est une violation flagrante de ce droit internationalement reconnu. En conséquence, lorsque l’État béninois prend une décision en violation a priori de l’accord, mais pour amener le Niger à revenir sur la violation qu’il a lui-même posée avant le Bénin, ça s’appelle de la contre-mesure. (…) Donc on ne peut pas accuser le Bénin d’avoir violé l’accord bilatéral entre le Niger et le Bénin sur ce transport du pétrole nigérien. », a-t-il déclaré.
Pour le député Topanou, cette violation des dispositions juridiques par Niamey est aussi remarquée sur le plan de la coopération régionale. « En maintenant les frontières au-delà des décisions de la CEDEAO, évidemment le Niger viole allègrement les dispositions pertinentes du traité de l’UEMOA qui, en son article 4 et 92, prévoit la libre circulation des personnes et des biens. Ces mêmes dispositions se retrouvent dans le traité révisé de la CEDEAO. », a-t-il souligné.
Le député du parti Union Progressiste le Renouveau invite le Niger à se conformer au droit international pour rouvrir ses frontières tel que souhaité par les autorités béninoises. « En prenant cette décision, et le Président de la République a très bien fait de le rappeler, c’est pour ramener le Niger à rouvrir ses frontières. Et donc on espère simplement qu’avec cette mesure, le Niger rouvrira ses frontières parce qu’il en va de l’intérêt de tous les deux pays, au-delà du Nigéria et même d’autres pays de la sous-région. », a rappelé le parlementaire.
Pistes de solutions
L’ancien ministre de la justice a estimé par ailleurs que cette crise diplomatique peut trouver une solution sur le plan politique. Il propose une médiation par le biais d’acteurs interposés même si cette méthode de négociation relève de la diplomatie informelle. « Dans l’intérêt aussi bien du peuple béninois que du peuple nigérien, et au-delà du peuple de la CEDEAO, il est souhaitable que cette crise s’achève au plus tôt et si besoin, on doit passer par la diplomatie informelle, je vais insister aussi bien au niveau du chef de l’État du Bénin que du chef de l’État du Niger, de laisser tomber la dimension formelle et pourquoi pas se plier au sein de la diplomatie parallèle. L’essentiel étant de sortir de cette crise », a-t-il proposé.