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Arracher l’Afrique au Syndrome Alpha Condé [Chronique Roger Gbégnonvi]

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Syndrome Alpha Condé qui est toujours déjà celui de Sékou Touré, de Lansana Conté, de l’éphémère Moussa Dadis Camara, et de nombreux autres chefs d’Etat africains, gardant le pouvoir à coups d’assassinats et d’emprisonnements d’opposants jusqu’à ce que mort s’ensuive ou que la soldatesque s’en mêle et procède à leur dégagement, morts ou vifs.
Sous le poids de leurs dirigeants pas vraiment sanguinaires, les Béninois étaient dans l’impasse et au bord de l’effondrement lorsque leur vint l’idée de se réunir en Conférence des Forces vives de la Nation. Dix jours de débats houleux. Un an de transition. Et une nouvelle constitution à la pierre de voûte accrochée à deux cônes voulus intouchables : l’un vous barre à vie le chemin de la Présidence si le mandat de cinq ans vous a été renouvelé une fois ; l’autre vous barre à vie le chemin de la Présidence quand vous avez 70 ans d’âge. Ce cône a fait chialer trois octogénaires, qui avaient gouverné le Dahomey quand ils avaient 50-60 ans. Voulant, à l’heure du Renouveau démocratique, retourner se rassoir dans leur bel ancien fauteuil, ils crièrent à la dictature et prononcèrent des incantations : « Vous ne m’enterrerez pas vivant », « Mes enfants et petits-enfants me vengeront ». Le troisième se mura dans un silence à l’éloquence terrorisante. Les Béninois firent le dos rond, ils tinrent bon. Mais il est vrai que, en République et en démocratie, la question s’est posée de savoir si l’on avait le droit d’exclure de la course à la Présidence de la République ces gens tenus pour sages dans la vie courante, où ils ne courent plus, car, aux assemblées où leur présence est demandée, on les voit dodeliner de la tête d’instant en instant, finir par ronfler, et même baver parfois. Sages dormants, pépés rattrapés par l’enfance. Dégradation humaine, trop humaine. Et si souvent étalée. Si donc Alpha Condé avait été Béninois, la constitution aurait préservé l’Afrique de la tristesse guinéenne du 5 septembre 2021, car les Béninois ont prévu respect et repos pour les gens âgés et fatigués : 83 ans, cela se repose et se respecte.
Mais il ne suffit pas d’une constitution inviolée et inviolable en sa pierre de voûte aux deux icônes inentamables pour arracher l’Afrique au syndrome Alpha Condé. A l’inviolabilité des textes de la République en Démocratie, il faut ajouter, par la peur de la sanction, l’impunité des violeurs desdits textes et des principes de ce que Montesquieu appelle « la vertu dans la république, la vertu politique ». Lesdits violeurs dorment en chacun de nous, Béninois, rêvant de se trouver à un poste de responsabilité lui permettant de jouir d’un faramineux crime économique pour devenir enfin milliardaire. Le cas échéant, au violeur réveillé, il faut opposer une belle férocité en termes de liberté confisquée et de mise en débet dissuasif. Eviter la peine capitale parce que le prophète Ezéchiel a dit en substance : « Dieu ne veut pas la mort du pécheur, mais qu’il se convertisse et qu’il vive » (18/21-28).
Se convertir, soi-même. Car Dieu et les dieux ne changent pas le cœur de l’homme, sinon Caïn n’eût pas tué Abel, l’Inquisition se fût contentée – étymologie oblige – d’enquêter en profondeur sans brûler personne, la guerre Iran-Irak n’eût pas eu lieu, etc. Plus attiré vers sa corruptibilité que vers sa perfectibilité, vers la Bête que vers l’Ange, l’homme est seul capable de s’amender lui-même, de s’éloigner de la corruption pour s’installer en orbite de perfection. Deux conditions politiques à cela : 1-Empêcher les dirigeants de s’accrocher au pouvoir comme la teigne au cuir chevelu. 2- Empêcher les gens âgés et fatigués d’aller au pouvoir, car le psalmiste a dit : « Le temps de nos années, quelque soixante-dix ans, quatre-vingts, si la vigueur y est, mais leur grand nombre n’est que peine et misère » (90/10).
Puisse la chute ubuesque du professeur Alpha Condé réconcilier tous Africains avec la plus grande modestie pour faire de la très riche Afrique le continent d’un très beau succès.

Roger GBÉGNONVI

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