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A l’aube du « hautement social » et de la dignité de tous [Chronique Roger Gbégnonvi]

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Le téléphone sonne. C’est la bien-nommée Filleule. Elle veut que vous soyez parmi les tout premiers à être informés de sa décision de partir. Oui, elle s’en ira en Amérique du nord où sa licence professionnelle intéresse une société qui a mis en ligne ses besoins en personnel. Elle en a assez de galérer à Cotonou. Ses trois filles en bas âge, elle peut les emmener. Là-bas, la société s’occupera du reste. A présent, elle cherche les sous pour les billets et le visa. Décidé. « Non, Papa, c’est sérieux, ce n’est pas de l’arnaque ! » Dont acte.
C’était le 8 décembre 2022, peu avant le Message sur l’état de la Nation. Le Messager ne bavarde pas. Dix à quinze minutes offertes au rituel, et il est retourné au travail. Mais cette fois-ci, surprise : au moins trois fois plus de temps consacré au rituel. Car il y avait de la matière. En nombre et en qualité. Il n’a pas annoncé le début du monde ni la transfiguration des vies béninoises. Ill a annoncé l’aube du « hautement social ». Une aube reflétant déjà les flagrances du soleil levant. Les Dahoméens vieillis sous le harnais béninois sont sous le charme. Du 1er août 1960 au 8 décembre 2022, ils n’ont rien entendu de tel. Un Message à la fois bilan, programme et tournant. Grâce à une gouvernance rigoureuse, « sans peur et sans reproche ». Comme en écho au Messager et à son Message, les ‘‘vieux’’ entendaient les mots suaves de Saint-John Perse : « Et sa parole nous est plus fraîche que l’eau neuve. Fraîcheur et gage de fraîcheur. » Or ne voilà-t-il pas que, au moment des mots et des chiffres financés du hautement social, le Messager soi-même est saisi par la Muse. Lumineux, le sourire levé, il lévite, il énonce comme un dire d’Oracle : « Moi-même, je n’en crois pas mes yeux, mes oreilles ! » Magique. Onirique. Qui donc ainsi s’enchanta ? Lui ou l’autre ? Ah, se souvenir : « Je sais que le ciel m’a donné quelque chose, j’ai un certain génie, je voudrais désormais que ce génie ne soit pas juste le mien, mais qu’il serve mon pays… J’ai besoin d’un challenge qui est de remettre le pays sur pied. » C’était à l’aube de la Rupture. Personne ne crut à l’incroyable, à l’impossible. Nous ne rêvons pas. Nous blackboulons l’impensé, l’inédit.
Prise au lasso des préparatifs de l’envol rédempteur pour elle et ses filles, la Filleule s’est-elle arrêtée pour écouter le Message de l’impossible en voie d’accomplissement ? Si oui, le Messager l’a-t-il convaincue de renoncer à voyager pour continuer à tenter sa chance au Bénin ? Pas sûr. De toute façon, par un réalisme et une humilité qui tranchent avec le volontarisme du Message, le Messager ne l’eût peut-être pas dissuadée, car « Ces efforts ne nous donnent pas l’illusion que chacun des concernés aura une vie décente. » Du moins pas tout de suite. Concernée insatisfaite, la Filleule peut donc, à 31 ans, tenter courageusement de trouver en Amérique du nord la vie décente que le Bénin ne lui propose pas encore.
Rupture. Remettre le pays sur pied. Quête d’une vie décente. Challenges que semble bénir Isaïe le Prophète : « Qu’ils sont beaux, sur les montagnes, les pieds du messager qui annonce la paix, / du messager de bonnes nouvelles qui annonce le salut, / qui dit à Sion : ‘‘Ton Dieu règne.’’ ». Sion, la Cité, notre Cité á remettre sur pied, où le Temple sera érigé par les pierres polies et apportées par chacun, où les filles de la bien-nommée Filleule viendront trouver la vie décente que Maman n’a pas pu y trouver pour elles quand elles y étaient petites filles. D’ailleurs l’exploit du Bénin aura essaimé de sorte que plus jamais les Africains n’iront demander le blé à un pays en guerre, plus jamais, UA ou CEDEAO, ils ne confieront à une puissance étrangère l’érection de leur Temple à Addis-Abeba ou à Abuja. En Afrique les Africains auront cheminé le chemin du Bénin, auront réalisé le hautement social pour tous et, du même élan, fait lever pour et sur tous le soleil de la dignité. Tous énergisés par Aimé Césaire toujours : « voici le temps de se ceindre les reins comme un vaillant homme ».

Roger GBÉGNONVI

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