Dans un contexte où des mesures sont prises par le gouvernement pour encadrer le secteur funéraire au Bénin, Lameteo s’est intéressé à l’incinération, une technique funéraire existante mais peu connue dans le pays. À Abomey-Calavi, des citoyens béninois ont partagé leurs avis contrastés sur ce sujet.
L’incinération, ou crémation, consiste à brûler le corps d’une personne décédée dans un four crématoire chauffé à 850°C ou plus, réduisant ainsi le corps en cendres. Bien que quelques crématoriums existent au Bénin, cette pratique est rare. La majorité des Béninois privilégient l’inhumation en pleine terre, une tradition ancrée dans toutes les régions du pays. Ceux qui optent pour l’incinération sont souvent influencés par la culture occidentale.
“Prendre mon corps entier et le calciner ? ”
À l’évocation de l’incinération, plusieurs personnes expriment un fort désaccord. Maman Caroline, une vendeuse de produits de première nécessité, résume ce sentiment : « Brûler le corps d’une personne me dérange un peu. Je ne suis pas d’accord avec ça parce que la personne est déjà décédée et on va encore faire souffrir son corps dans le feu. L’enterrer est mieux pour moi que de le brûler. »
Anita, mariée et mère de trois enfants, préfère faire don de ses organes vitaux plutôt que d’être incinérée. « Je préfère qu’on prenne des organes de mon corps et qu’on en donne à ceux qui en ont besoin. Mais prendre mon corps entier et le calciner, ce n’est pas mon souhait », confie-t-elle.
Préoccupations religieuses et culturelles
Jean, un fervent chrétien, s’oppose également à l’incinération, invoquant des raisons religieuses et culturelles. « Au plan religieux, les croyances et traditions des familles ne permettent pas ces genres de choses, cela détruit même les valeurs des cultures endogènes », explique-t-il.
Une vendeuse de Atassi, un plat prisé au Bénin, partage cette opinion. « Non, mon corps ne sera pas brûlé. S’ils décident de l’enterrer le même jour, qu’ils le fassent », déclare-t-elle.
Prévention de la profanation et économie d’espace
Malgré ces oppositions, certains Béninois soutiennent l’incinération. Solange, une mère de famille, préfère la crémation pour éviter les profanations de tombes à des fins rituelles. « Je pense que le mieux à faire, c’est la crémation des corps. Nous sommes en Afrique, tu peux enterrer ton mort et quelqu’un d’autre va passer déterrer son corps, en amputer certaines parties pour en faire quelque chose. »
Frérot, un jeune photographe, estime que la crémation est une solution pour économiser de l’espace et éviter les chevauchements de tombes dans les cimetières. « Les corps occupent assez d’espace. Raison pour laquelle on déterre parfois certains corps pour ensevelir d’autres. Il faut donc les brûler et ce sont des cendres issues de ces corps qu’on va enterrer. Ainsi, cela va occuper moins d’espace et dispenser du coût parfois exorbitant des funérailles », suggère-t-il.
À l’instar de l’inhumation, l’incinération demeure une pratique peu courante au Bénin, confrontée à des défis culturels, religieux et environnementaux. Toutefois, les avantages qu’elle présente, notamment en termes de prévention des profanations et d’économie d’espace, pourraient amener davantage de Béninois à considérer cette technique funéraire dans les années à venir.