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Bénin : Des “zéms” à cheval entre la moto en ville et la houe dans les champs au village

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Dans les grandes villes du Bénin, comme Cotonou et Abomey-Calavi, on les reconnaît par leur chemise uniforme de couleur jaune. On les appelle Zem ou Zémidjan. Venus parfois des villages de l’intérieur du pays, ils sont des conducteurs taxis-motos. Parmi eux, il y a de vrais cultivateurs pour qui la recette issue de la conduite de moto sert à entretenir leurs champs situés à des centaines de kilomètres des rues asphaltées des villes, leurs lieux de travail. Une équipe de la rédaction Lameteo est allée à leur rencontre à Abomey-Calavi.

Suivez ici le reportage en version française

Calavi Kpota, dans la commune d’Abomey-Calavi. Une gare routière au bord de la voie Cotonou-Bohicon. C’est le lieu de rencontre entre les conducteurs de taxis-motos et voyageurs. Debout, les Zems, les plus habiles sont les premiers à s’emparer des clients. Nous nous sommes rapprochés d’eux. A peine nous posons la question avec sourire : «Qui parmi vous a d’autres activités en dehors de la conduite de la moto? ». “Le voilà, les voilà! ” nous répondent certains. Trois parmi eux se détachent effectivement du lot de la dizaine et se rapprochent de nous. Ils sont tous à la fois Zems et cultivateurs.

Il y a trois jours que je suis venu à Abomey-Calavi. J’avais passé deux mois au village. Je suis allé cultiver. Si je manque de moyens financiers, je viens conduire la moto pour chercher de l’argent. Je transfère l’argent à ma femme au village. Une fois l’argent reçu, ma femme cherche ceux qui doivent l’aider à cultiver les champs”, raconte Codjo, la vingtaine d’âge. Il est l’un des conducteurs de taxi-moto et cultivateur dont la ferme se situe à Panhouian, à plus de 200 kilomètres d’Abomey-Calavi. Selon lui, quand il n’est pas au champ, c’est qu’il conduit le taxi-moto. Et conduire lui permet d’avoir des moyens financiers pour faire face aux travaux champêtres en son absence.

Actuellement détenteur de 2 hectares de soja, sa présence dans la ville en est la preuve : “Je viens chercher de l’argent pour payer d’engrais pour mes cultures”. Toutefois, Codjo dit avoir des difficultés à concilier les deux activités. “Si je bénéficiais de soutiens, je ne me lancerais pas dans la conduite de taxi-moto. Je me contenterais de l’agriculture. Le métier de zémidjan nécessite assez de sacrifices. Il y a trop de risques dedans.”, a-t-il déploré. Mais ce agriculteur ne compte pas abandonner la conduite de taxi-moto.

Suivez ici le reportage en version fongbe

Nous aimons cultiver la terre. Mais consacrer tout notre temps à cultiver devient difficile. C’est pourquoi nous venons ici conduire moto. D’ici, nous envoyons de l’argent à un proche qui se charge de rassembler des gens pour les travaux champêtres. Lors de la récolte, je m’y rends moi-même au village et nous récoltons ensemble.”, explique Constantin, un autre conducteur taxi-moto, originaire de Tindji dans le plateau d’Abomey à une centaine de kilomètres d’Abomey-Calavi. Vue l’étendue de son champ (4ha), le jeune de 30 ans estime qu’il ne peut pas tout faire seul. Donc, il faut qu’il conduise la moto pour pouvoir trouver des moyens financiers et appeler d’autres agriculteurs à l’aider contre de l’argent. “Dans l’exercice de mon activité de “zémidjan”, si je ressens de la fatigue, j’en profite pour aller au village et m’occuper du champ.”, a-t-il ajouté.

A l’en croire, tout n’est pas rose. “Si la saison est bonne, je gagne mon peu. Mais si elle est mauvaise, je perds. Il m’est arrivé une fois, que je perde tout et que je sois obligé d’acheter de nouveaux grains pour de nouvelles mises en terre.”, se souvient-il.

Comme lui, d’autres envoient en moyenne 10.000 francs CFA par semaine à leur famille restée au village pour l’entretien des cultures.
A la question de savoir s’ils envisagent un jour se mettre ensemble en coopérative de conducteurs de taxi-moto ayant des fermes pour bénéficier des fonds mis à disposition par l’État pour les exploitants agricoles en coopérative, les réponses se résument en une seule phrase : “on n’y a pas encore pensé”.

Didier ZINSOU et Philippe LOKONON

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