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Comment l’Afrique relèvera le défi de Hegel [Chronique Roger Gbégnonvi]

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Quel Africain au sud du Sahara n’a jamais murmuré tout seul : « Et l’Afrique dans tout ça » ? Face au monde occidental sans cesse créateur, modelant et remodelant la vie, installant les OGM, l’intelligence artificielle et le mondialisme, projetant avec ardeur le transhumanisme, etc., la lenteur de l’Afrique a tout de l’immobilisme, et l’Africain, sensé et conscient, peut en devenir pensif. Homme lui aussi, n’aurait-il cependant aucune impulsion à insuffler à l’existence ? N’aurait-il qu’à tout recevoir pour le meilleur et pour le pire, n’aurait-il qu’à parasiter le monde ? Un parasite ne s’enrichit pas à se contenter des miettes de quelque table. Et l’Afrique est pauvre bien qu’elle ait sur son sol et en son sol tout ce dont a besoin l’Occident industriel et qu’il vient chez elle ramasser. Incapable en effet d’exploiter elle-même ses matières premières, l’Afrique laisse emporter ses richesses contre des royalties dont elle se contente volontiers, quitte à paraître insouciante, voire fainéante. Et donc, méprisable. Prête à étaler ses problèmes sans pour autant qu’on la voie s’enrager pour conquérir les solutions, l’Afrique se fait mépriser par ses « partenaires au développement ».
Le Président des Etats-Unis reçoit les Chefs d’Etat africains en groupe, comme si chacun, seul, ne saurait mériter les mêmes honneurs que le Président du Mexique, seul. Sans consulter outre mesure ses ‘‘homologues’’ africains, le Chef d’Etat français renverse la table. Non plus France-Afrique mais Afrique-France. Et il y convie des jeunes Africains mandatés par lui seul. Ses invités saisissent l’occasion pour conspuer, face aux caméras de la télévision, « la marmite sale » qu’est à leurs yeux le prétendu partenariat entre la France et les pays africains. Et c’est peut-être le but recherché in petto par l’hôte : « Vous le voyez, les jeunes de vos pays ne comprennent rien à notre coopération. Faites bloc autour de moi pour que nous les ramenions à la raison ! » Sinon à quoi aura servi le déballage public dont l’hôte devait savoir qu’il se produirait ? Il consent à restituer au Bénin des « objets pillés par la France » (sic) dans les palais d’Abomey. Pourquoi garder certains, quitte à dévaloriser ceux qu’il a restitués ? « Bof, reprenez ceux-là ! Les plus originaux garniront mes musées. »
Ce sont exemples du mépris subliminal que doit subir l’Afrique de la part de ses ‘‘amis’’ occidentaux. Si l’on veut dénoncer ce mépris, s’en plaindre, le reprocher à l’Occident, il est devenu obsolète et inopérant d’évoquer l’esclavage et la colonisation. Et selon Aimé Césaire, même « la vieille négritude progressivement se cadavérise ». Pour répondre à la question « et l’Afrique dans tout ça ? », il faut évoquer Hegel, écrivant déjà en 1830 : « Nous laissons l’Afrique pour n’en plus faire mention. Elle ne fait pas partie du monde historique, elle ne montre ni mouvement, ni développement… [Sa] place se trouve encore au seuil de l’histoire universelle ». Il faut vouloir relever aujourd’hui le violent défi lancé à l’Afrique par le professeur Hegel. Pour le faire avec succès, l’Afrique doit combler sans délai comme une crevasse. Elle la comblera en écoutant le cœur battant de l’histoire universelle : le monde est écrit avant que d’être digitalisé, la mélodie est écrite avant que d’être chantée, la chorégraphie est écrite avant que d’être dansée, Moïse, Jésus et Muhammad sont écrits avant que d’être prêchés. « Ce que Dieu a déposé dans le monde, ce sont des mots écrits », écrit Michel Foucauld. Parce que l’animal n’écrit pas, il n’a pas créé de civilisation qu’il puisse exporter. Parce que l’homme écrit, il a créé des civilisations qu’il exporte, souvent à coups de sabre et de goupillon. Halte donc au sempiternel bavardage, à la procréation abondante et irresponsable, aux fronts prosternés quémandeurs du pain quotidien. Que toute l’Afrique se mette maintenant à écrire. N’importe quoi n’importe comment. Mais se mette à écrire. L’homme fait son salut par l’écriture. C’est ce qu’enseigne l’histoire des grandes civilisations.

Roger GBÉGNONVI

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