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Éditorial

Chronique : Pour que le monde ne méprise plus les Africains

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Il est clair encore en cette année 2018 : le monde méprise l’Afrique et les siens. Et ce n’est point pour cette histoire de vente des Africains en Libye au XXIème siècle comme au XVIème siècle. Et ce n’est point parce que le Liberia vient de porter à sa tête un footballeur à la retraite que de grands clubs européens vendaient et achetaient entre eux pour la gloire de leurs stades. Il faut d’ailleurs voir d’un peu plus près cette chose : un pays dont les nouvelles institutions démocratiques n’ont pas la solidité que confère l’épreuve du temps, un pays mis à sac par plus d’une décennie de guerre civile, un pays exténué par la fièvre Ebola, un pays aux habitants porteurs de profondes blessures loin d’être cicatrisées, confier la direction de ce Liberia-là à un homme seulement célèbre pour ses dribbles, ses coups-francs, ses tirs au but, ses corners et choses semblables ! Voilà un folklore aux promesses de tragédie.

Tragique folklore bien africain, hélas ! Il s’est vu récemment sur le petit bout d’Afrique dans les Caraïbes, petit bout renfermant un grand bout du Dahomey esclavagiste. Un troubadour haïtien, qui chantait pour les Américains, se précipita hors de leurs studios et surgit président de la République d’Haïti. ‘‘Haïti où la négritude se mit debout pour la première fois et dit qu’elle croyait à son humanité’’, Haïti en détresse permanente parce que jeté par les négriers sur une terre revêche, Haïti tout juste mis à sac par l’un de ses plus violents tremblements de terre, confier la direction de cet Haïti-là à un troubadour ! Feu-follet il fut. Il s’en retourna chanter et danser. Il laissa Haïti à son habituelle tragédie.
Tragédie bien africaine, hélas ! Elle s’est vue naguère en Oubangui-Chari, du fait d’un gros-bras qu’utilisa la ‘‘Mère-Patrie’’ aussi bien contre les nazis que contre les résistants vietnamiens et algériens. Revenu chez lui, il se proclama président à vie puis maréchal, et, en sus, empereur à la façon de Napoléon 1er, dont il se couvrit des oripeaux. Etait-il cannibale, avec beaucoup de chair humaine dans ses congélateurs ? Légende que cette histoire ? Il est avéré en tout cas que, à Bangui, pour punir des écoliers récalcitrants, le sicaire leur creva les yeux de sa canne impériale. Rendu à l’errance, il abandonna la Centrafrique à l’errance et à la misère, à côté de ses forêts, de ses mines de diamant et d’or, exploitées par d’autres.
Errance et misère bien africaines, hélas ! Car footballeurs, troubadours, gros-bras et semblables, sont incapables de développer un pays. Ils peuvent juste le vendre, comme ils ont aimé à se vendre. Et le monde développé, joyeusement, tire du feu les marrons africains. Et le monde n’aura de cesse de mépriser les Africains tant qu’ils supporteront à leur tête des dirigeants plus ou moins conformes à ceux-là ci-dessus, boursouflures d’apparence et de grandiloquence, á qui l’on servira des couleuvres en leur disant que ce sont des spaghettis. Et ils goberont, heureux. On leur servira, par exemple, à Ouaga, qu’ ‘‘il n’y a plus de politique africaine de la France’’. Et pour qu’ils n’en doutent pas, on passera quelques heures à Acra pour y tailler bavette en anglais. L’arsenal fomenté par de Gaulle, pour que l’Afrique serve la France encore et toujours, est intact : le pétrole pour la France au Gabon et au Congo-Brazzaville, l’uranium pour la France au Niger, le franc des Colonies Françaises d’Afrique (CFA), intouché, 50% des devises de ces CFA détenus par le trésor français, ces CFA qui sont le socle de la francophonie, etc., et ‘‘il n’y a plus de politique africaine de la France’’ !
Des sornettes toujours remodelées pour endormir les morts et les Africains, pour exploiter à fond les Africains tout en les méprisant. Pour que le monde ne méprise plus les Africains, il faut qu’ils aient à leur tête des Sankara et des Rawlings. Ou, carrément, le roi Christophe de la Tragédie d’Aimé Césaire ; révolté et en colère, il renvoya la ‘‘bande de paresseux et de goinfres’’ (sic) autour de lui et décida : ‘‘Moi, le roi, je veillerai seul.’’

Roger Gbégnonvi


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