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Ambitions de la nouvelle Charte des partis politiques du Bénin [Chronique Roger Gbégnonvi]

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Depuis quelque temps, il n’est clameur et fureur dans nos conversations que du recul de notre belle démocratie au travers, entre autres, de l’assassinat du multipartisme intégral. Or, à considérer de plus près ce méchant grief d’assassinat, il n’en est peut-être rien.
De quoi s’agit-il en effet ? Jusqu’à l’adoption de la Loi n° 2018-31 portant Charte des partis politiques en République du Bénin, modifiée et complétée par la Loi n° 2019 du 15 novembre 2019, un parti politique était la propriété exclusive de celui ou celle qui l’avait créé. Les membres ne payaient guère de cotisation. Le créateur avait donc en charge les frais d’entretien de sa création. S’il lui arrivait d’avoir accès au trésor public, il ne s’interdisait pas des combines répréhensibles pour y puiser au profit de son parti. Ses élus au Parlement, nonobstant salaires, nonobstant primes et indemnités diverses et variées, se vendaient á l’Exécutif à dix millions le député pour chaque loi importante à voter. C’est dans le livre de François Awoudo, paru en 2004, dans lequel le préfacier a vu « l’univers de l’immoralité politique dans son pays le Bénin ». Et nul ne porta plainte. Car « moi aussi j’ai pris l’argent ! »
Deux ambitions animent la nouvelle Charte des partis politiques du Bénin. Première ambition :- Détacher les partis politiques des gens d’argent, des régions, des villages et des ethnies, et les rattacher à la Nation tout entière dont « chaque député est le représentant » aux termes de l’Article 80 de la Constitution. Pour y arriver, l’Article 16 de la Charte énonce : « Le nombre des membres fondateurs d’un parti politique ne doit pas être inférieur à quinze (15) par commune. » Quinze personnes réelles et non fictives, répondant, chacune, à tous les critères fixés par la Loi. Aucun des 58 articles de la nouvelle Charte n’interdit le multipartisme intégral. Il nous est donc loisible de ressusciter nos 250 partis d’antan. Il suffira à chaque parti de réunir un total d’au moins 1155 fondateurs pour l’ensemble des 77 communes actuelles. Au prorata de 250 partis, si le nombre des Communes n’augmente pas, sur l’étendue du territoire on compterait au moins 88935 fondateurs. Et comme le Béninois aime qu’on le distingue, le Bénin se transformerait en un vaste jardin fleuri de ‘‘Monsieur le Fondateur’’, ‘‘Madame la Fondatrice’’, bourgeons annonciateurs de ‘‘Honorables Députés’’.
Deuxième ambition de la nouvelle Charte :- Réduire l’ampleur de « l’immoralité politique ». Pour y arriver, le chapitre III, fait de trois articles, est intitulé « Du financement des partis politiques ». L’Article 39, le dernier des trois, précise : « Les subventions de l’Etat aux partis politiques représentent l’aide destinée au financement des activités des partis politiques. » Cette ‘‘aide’’ n’exclut pas ce que l’article 32 avait appelé « les ressources propres ou externes des partis politiques en dehors de subventions et autres aides de l’Etat ». Les trois articles du chapitre III de la nouvelle Charte apportent du grain à moudre à l’Article 5 nouveau de la Constitution, qui stipule : « L’Etat concourt au financement des partis politiques aux conditions fixées par la loi… »

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Les deux ambitions ci-dessus constituent des garde-fous solides à la création des partis politiques, de peur que la démocratie béninoise ne se détériore et, de faiblesse en vacillement, n’aille s’écraser sous les bottes de quelque soldatesque putschiste. La nouvelle Charte des partis politiques en République du Bénin consolide les bases et les acquis de notre démocratie. Plus de paris-maison. Et Faute d’absorber toute « l’immoralité politique », les mesures ci-dessus devraient pouvoir l’atténuer. Et nul ne devrait se plaindre que notre démocratie se discipline et se civilise de plus en plus en attendant et en espérant que la politique, service de la cité et des citoyens, deviendra ou redeviendra au Bénin un métier d’honnêteté et d’honneur. Alors parmi les nations grandes, le Bénin sera une grande nation.

Roger GBÉGNONVI

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