lamétéo.info
Chronique

[Chronique Roger Gbégnonvi] Chemins et textes pour la victoire

Partager

« Les hommes meurent et ils ne sont pas heureux ». Constat aussi vrai que tragique d’Albert Camus. Et comment pourraient-ils être heureux, les hommes, quand leurs religions s’entrechoquent, leurs politiques s’entredéchirent et qu’ils ont, les hommes, le triste art de considérer comme ennemis ou adversaires leurs voisins proches et lointains ? Il y aurait de quoi désespérer définitivement s’il n’existait des chemins d’espérance connus des hommes, et qu’ils s’appliquent à déserter. Voici trois de ces chemins à même de leur assurer la victoire et le bonheur, sur le long terme, quand ils décideront de les cheminer dans l’effort.
Le premier chemin : « Tout ce que vous voulez que les hommes fassent pour vous, faites-le vous-mêmes pour eux : voilà la Loi et les Prophètes. » (Matthieu, 7/12). La charité bien ordonnée ne commence donc point par soi, mais par l’autre, vers qui je me tourne pour que, ensemble nous soyons le monde en marche. Les Béninois disent : « Quand tous, penchés sur le feu, jouent des coudes pour être le premier á faire cuire son épi de maïs, le feu s’éteint, et tout le monde échoue ». On aura remarqué l’insistance de Matthieu pour mettre en majuscules ‘‘Loi’’ et ‘‘Prophètes’’, dont il libère l’homme. Matthieu a-t-il inspiré Emmanuel Kant ? « Le ciel étoilé au-dessus de moi et la loi morale en moi.» Moi, je suis responsable. « Moi, le roi, je veillerai seul » (Aimé Césaire).
Le deuxième chemin : « Le sabbat a été fait pour l’homme et non l’homme pour le sabbat. » (Marc, 2/27). Il confirme le premier en rejetant tout formalisme porteur d’ankylose et de malheur sous le label du divin. Platon a critiqué l’anthropocentrisme de Protagoras. Et si c’était lui, Protagoras, qui avait raison ? « L’homme est la mesure de toutes choses. » Il est celui qui, ici et maintenant, écrit le monde, écrit les livres sacrés, crée les dieux : « Mê wê non do ni nyí Vodun b’ê non nyí Vodun », oui, « est Vodun ce que l’homme déclare Vodun », proclament sereinement hommes et femmes de l’ère culturelle et cultuelle Aja-Tado au sud du Bénin et du Togo. Auguste responsabilité personnelle et collective que celle des hommes.

Bannière publicitaire

Le troisième chemin : « Nul ne peut servir deux maîtres : ou il haïra l’un et aimera l’autre, il s’attachera á l’un et méprisera l’autre. Vous ne pouvez servir Dieu et l’Argent. » (Matthieu, 6/24). Si l’on envoie l’enfant à l’école non pour qu’il étudie mais pour qu’il étudie afin de gagner de l’argent plus tard, si l’on se met en couple parce que le partenaire a de l’argent, si l’on enferme le cadavre à la morgue pour chercher l’argent des obsèques festives qui offriront l’occasion d’empiler les enveloppes-cadeaux pleines d’argent, alors l’argent n’est plus au service de la vie, mais la vie au service de l’argent. Il n’y a plus le beau et le bien, il n’y a plus que l’argent. Et pour l’avoir, comme on dit au Bénin, on est prêt à vénérer la jument, son poulain et leur crotte. Et c’est alors que « Qui veut gagner sa vie la perdra » (Luc, 9/24). Car il porte mon malheur l’argent après lequel je cours au lieu que ce soit lui qui me court après de par ce que j’entreprends et fais pour le progrès de l’homme
Ces chemins et chemins semblables existent dans toutes les cultures humaines. Mais ce sont chemins difficiles à cheminer, et nous avons tôt fait de les diviniser, d’appeler ukases tombés du Ciel les textes qui les désignent. Textes que nous enfermons dans des livres que nous avons décrétés sacrés et vénérables. Et que nous encensons pour ne pas avoir à les appliquer. Car il est vrai que leur mise en application requerrait de nous une tension constante vers le haut. Car il est vrai qu’il est très reposant de les encenser. Mais alors nous ne montons pas, nous n’allons nulle part. L’homme irait quelque part s’il acceptait d’être l’un de « ces soldats qui tombent, au cours de l’assaut dont sortira la Paix » (T. de Chardin). Car ce sont chemins et textes pour la perfection à rechercher, pour la victoire à remporter.

Roger GBÉGNONVI

Partager

Articles similaires

Gantin et Lustiger, hérauts du moi responsable [Chronique Roger Gbégnonvi]

Venance TONONGBE

Chronique Roger Gbégnonvi| Démocratie et parrainage politique

Venance TONONGBE

Quitus et vies du quitus au Bénin [Chronique Roger Gbégnonvi]

Venance TONONGBE

Laissez un commentaire

You cannot copy content of this page