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[Chronique Roger Gbégnonvi]: Main tendue aux exilés béninois

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Dans un Bénin longtemps laxiste, théâtre d’arrangements amicaux et frauduleux entre gens puissants, on a été surpris par la concordance des mots et des actes qu’a décidée le gouvernement dit de la Rupture. L’inattendue nouvelle donne a poussé des Béninois à prendre le chemin de l’exil au motif que la justice qui les avait frappés ou risquait de les frapper relevait de l’injustice. Ce procès fait à la justice et suivi aussitôt de la décision de s’exiler, c’est toujours le fait d’une infime minorité de citoyens qui en ont les moyens en termes d’argent et de relais puissants à l’intérieur et à l’extérieur. Quant à la multitude des citoyens, au train de vie normal, elle accepte, sans faire d’histoire, la justice du pays : « Dura lex sed lex », la loi est dure, mais c’est la loi. Et elle s’impose à vous, elle s’impose à tous.
Nonobstant argent et relais puissants, les exilés s’aperçoivent très vite que l’exil est une impasse, une errance douloureuse, dont ils ignorent quand et comment elle finira. Et comme il n’y a pas d’errance porteuse de dignité et d’honneur, Ils sont tristes, en leur for intérieur, de se savoir surveillés, traqués. Ils souffrent. Ils aspirent à revenir chez eux pour une existence convenable, au milieu de gens connus, dans un décor familier, avec liberté d’aller et de venir. Cette aspiration, nous pouvons aider les exilés béninois à la combler. Sans créer une classe de privilégiés. Sans donner raison à La Fontaine : « Selon que vous serez puissant ou misérable / Les jugements de cour vous rendront blanc ou noir. » Non, pas de passe-droit. On ne minimisera rien. Le respect de la justice. La même pour tous. Comme il sied en démocratie. Mais alors, comment aider nos frères exilés à revenir, tête non basse ?
Deux personnalités : le Médiateur de la République plus un homme politique consensuel, volontairement retiré de la politique. Ils parlent avec le Chef de l’Etat pour se porter garants du retour des exilés souhaitant revenir. Ils obtiennent qu’ils soient accueillis avec humanité et dignité, dans le respect toutefois des lois de la République. A leur retour, s’il a accepté de revenir, le condamné à 20 ans de prison commencera à purger sa peine, quitte à se faire rejuger puisqu’il était absent lors du verdict et que l’habeas corpus n’avait pas joué. Les deux médiateurs auront obtenu que sa cellule de détention ne soit pas un violon, qu’il puisse y travailler à l’aise avec ses avocats pour apporter les preuves de sa possible innocence. Ceux qui sont partis sans avoir satisfait à la demande d’explication à eux adressée ont sans doute compris, pendant l’exil, qu’il était du devoir de tout responsable de répondre de la gestion faite du bien public dont il a eu la garde. A leur retour, ils répondront, en état de liberté conditionnelle. Quelles que soient la peine déjà prononcée et celles à prononcer, il reviendra au Chef de l’Etat de les réaménager s’il le juge faisable, fort de ses prérogatives de Magistrat suprême, et compte tenu, peut-être, de la qualité des services rendus, malgré tout, à l’Etat par les condamnés. Munis de cette feuille de route, les deux médiateurs écrivent à chacun des exilés béninois et, à ceux d’entre eux ayant accepté de revenir sous ces conditions, ils fixent rendez-vous à Lomé à date convenue. Les Chefs d’Etat du Bénin et du Togo se seront entendus pour que, conduits par les deux médiateurs, les exilés béninois de retour soient raccompagnés aux frontières sans ambages et sans tapage.
Le pays à l’origine des Conférences Nationales pour apaiser les cœurs est capable de cette main tendue aux exilés béninois. Main tendue dans le respect de la loi et de la dignité des personnes. Pour qu’il y ait dans le pays un pôle de tension en moins. Pour qu’il soit fait un pas de plus en direction de notre vivre-ensemble-dans-la-paix. Nous tous, potentiels justiciables, avons intérêt à cette main tendue. Pour le désir qui rend possible le progrès. Pour l’élan où nous voulons nous inscrire de « faire quelque chose pour le bonheur ».

Roger Gbégnonvi

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