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Paradoxe du prêtre béninois en France

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En vérité, il s’agit de tout prêtre d’Afrique francophone incardiné en France, c’est-à-dire devenu membre à part entière du clergé français, sous la juridiction de l’évêque français de son diocèse, dans cette France dont les « prêtres meurent et ne sont pas remplacés », où « le nombre de catholiques ‘‘pratiquants réguliers’’ est devenu marginal (entre 2 et 4% aujourd’hui [2018], contre 25% en 1960). » Mais de focaliser sur le Bénin permet d’illustrer le paradoxe aujourd’hui d’une situation transposable, par exemple, sur Madagascar. Prenons deux dates. En 1861 arrive au Bénin le premier missionnaire, un vrai, pas un aumônier des bateaux négriers. En 1928 est ordonné le premier prêtre béninois. De 1861-1928 à aujourd’hui, le Bénin s’est-il approprié « le dépôt de la foi » de sorte que des prêtres béninois puissent le restituer dans sa densité à la France qui l’a reçu et mûri avec les autres nations d’Europe pendant près de deux mille ans ? Car la foi est une affaire de transmission et pas de récitation. Question donc de légitimité du prêtre africain en France. Deux autres dates. Le 23 juillet 1981, Jean-Paul II, souffrant, fait du cardinal béninois Bernardin Gantin son légat au 42ème congrès eucharistique international de Lourdes. Au moment de l’homélie, arrêt soudain du système de sonorisation. Ici et là on y a vu une panne délibérée pour « faire taire ce Nègre » qui ose s’adresser aux Français au nom du Pape. Le 13 janvier 1995, obéissant au même Souverain Pontife, le même cardinal retire à Mgr Jacques Gaillot son siège d’Evreux. Suite à cela, le prélat béninois essuya des salves de lettres venues de France agonir et remettre à sa place «ce Nègre qui doit tout à la France ». Effaré, un de ses prêtres, Alphonse Quenum, historien, fit un autodafé des valises d’injures pour innocenter l’Eglise universelle. De 1981-1995 à aujourd’hui, les Français ont-ils apaisé leur regard sur l’Africain de sorte qu’un Béninois, curé d’une paroisse de France, puisse aux Français « annoncer la bonne Nouvelle du Salut » ? Question donc de crédibilité du prêtre africain en France. Un Juif catholique a été archevêque de Paris. Il a même obtenu qu’on dise à ses obsèques le « Chema Israël ». Imagine-t-on aujourd’hui un prêtre africain évêque du diocèse le plus obscur de France ? Il est certain qu’il sera perçu et rejeté par les fidèles résiduels comme un vil usurpateur. Qu’on l’utilise à rabâcher le dogme, d’accord ! Mais que le Pape ne s’y trompe pas : la cathèdre de la cathédrale est réservée à un Français de France. Fût-il juif. La France s’est déchristianisée, c’est sûr. Pour diverses raisons, les Français estiment aujourd’hui qu’ils ont bien mieux à faire que d’aller remplir les églises. Les séminaires se vident. Pour autant on ne doit pas laisser croire que la foi catholique française est un arrangement aujourd’hui en panne auquel un prêtre africain francophone peut tendre une main secourable. Entretenir la mèche qui fume encore en France n’est pas son rôle. Ce peut être celui du prêtre polonais (l’archevêque juif de Paris était d’origine polonaise), héritier lui aussi de l’Europe aux racines chrétiennes depuis près de deux mille ans. La mèche qui fume encore en France peut redevenir flamme qui éclaire, mais pas grâce à des prêtres burundais. Si les prêtres africains, notamment béninois, croient qu’ils peuvent contribuer à rechristianiser la France, ils se trompent. Ils risquent en sus de passer pour d’utiles réfugiés économiques, à l’instar des médecins africains très présents dans la banlieue parisienne, très peu dans les bourgs africains démunis ; ils sont certes mieux tolérés et moins méprisés que les éboueurs africains dans les rues de France. Mais il ne sied pas que des prêtres africains, notamment béninois, ramènent leur sacerdoce à un boulot de survie économique. Prêtres africains incardinés en France, voilà un paradoxe, un de ces attrape-négro où l’Africain, se croyant honoré, se laisse enfermer, loin de la dignité et de l’honneur de l’Afrique.

Roger Gbégnonvi 


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1 Commentaire

Robert Paul ETIENNE octobre 1, 2019 at 9:18

Faudra que ce cher Professeur m’explique pourqyuoi le Cardinal SARAH est si apprécié des français blancs, au point que chaque conférence pou présence à un événement de sa part déplace des foules considérables ???

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