lamétéo.info
Chronique

Bénin-Gouvernance : Il y a exil et exil

Partager

Quand il a eu perdu la guerre, le souverain fut exilé : le vainqueur continuai d’avoir peur du vaincu. Au temps de la Révolution, de nombreux Béninois s’exilèrent par peur de l’autocratie régnante. Victor Hugo s’était exilé par peur du prince-président dont il critiquait le pouvoir. Dans son pays d’exil, il écrivait : ‘‘Quand la liberté rentrera, je rentrerai’’. Emile Derlin Zinsou, lui aussi exilé volontaire, disait, dans son pays d’exil : ‘‘Je m’aère’’. S’aère-t-on vraiment en exil ? Tout exil, imposé ou volontaire, est motivé par la peur. Tout exil est donc lieu de souffrance, souffrance dont l’exilé souhaite vivement la fin pour retourner vivre libre dans son pays. Béhanzin voulait revenir vivre libre à Abomey et non pas mourir en exil.
C’est pareil pour les quelques Béninois qui ont choisi de s’exiler depuis 2017. On comprend leur peur, leur souffrance, leur désir de revenir vivre libres. Mais on doit leur dire que leur exil n’a pas la noblesse de celui des exilés ci-dessus. Il y a exil et exil. Quand on a été haut fonctionnaire, maire d’une grande ville, ministre ou député, et que l’Etat demande à voir clair dans votre gestion du bien public, on ne s’enfuit pas, on reste. Soupçonné de fraude fiscale, le ministre Jérôme Cahuzac n’a pas couru s’installer à Cotonou ou à New-York et commencé à injurier François Hollande. Il a fait face, quitte à mentir d’abord avec aplomb.
Parmi nos nouveaux exilés volontaires, est à part le cas de notre concitoyen soupçonné de narcotrafic. Son cas peut rappeler un témoignage sur 400 pages, livre de poche, dont le seul titre doit attrister le papa qu’il est : ‘‘Moi, Christiane F., 13 ans, droguée, prostituée…’’ De dose en surdose, de crise de manque en crise de manque, la jeune fille allemande s’est éteinte autour de ses 15 ans, emportée par les affres de l’héroïne. Se faire de l’argent avec ‘‘ça’’ ? Le problème de la toxicomanie chez les adolescents est tragique. Les ravages de la drogue sur la santé physique et psychique de ceux qui s’y adonnent sont tels qu’en Chine, autrefois ‘‘pays de l’opium’’, le narcotrafic est puni de mort, pendant que les Etats-Unis le punissent de la prison à vie. La cocaïne n’est pas la raison d’être de Boko-Haram, mais ses membres se droguent pour entrer dans l’état animal qui leur permet de violer, tuer, brûler, en ayant imposé silence à leur cœur humain et à tout sentiment humain.
Soupçonnés de fraude, de mauvaise gestion ou du gravissime trafic de drogue, nos concitoyens, nouveaux exilés volontaires, devraient mettre fin à ce volontariat de mauvais aloi et revenir au Bénin pour s’expliquer, se montrer responsables, avancer d’éventuelles circonstances atténuantes s’ils devaient être reconnus coupables. Faire face. La présomption d’innocence s’étiole quand on s’en va en cavale en la laissant derrière soi. A coups et à coût d’avocats compétents, nos exilés volontaires s’en sortiront bien mieux qu’ils ne croient, au lieu que leur fuite signifie aveu de culpabilité, parce que leur peur est entachée de honte.
La jeunesse béninoise, surtout, a besoin que reviennent au Bénin nos nouveaux exilés volontaires. Pour rendre compte avec honnêteté et courage. Alors la jeunesse ne croira plus qu’on peut s’enrichir n’importe comment, se soustraire ensuite au contrôle de l’Etat en allant se réfugier dans quelque cité de France et de Navarre, et l’on abandonne les victimes de notre délire de possession aux vaches maigres du taxi-moto, de la vente porte-à-porte des produits GSM, de l’alimentaire et humiliant Marie-couche-toi-là. Alors la jeunesse béninoise n’ira pas se convaincre qu’à son tour, si son tour il y a, elle s’autorisera à faire pire pour prendre une ‘‘belle’’ revanche sur les aînés. Honnêteté comporte honneur. Et les latins disent ‘‘honor onus’’, l’honneur est une charge. Nos nouveaux exilés volontaires doivent revenir assumer la charge de l’honneur. Mais s’ils n’ont ni honneur ni courage, alors la cause est entendue : ils peuvent faire de vieux os en exil, dans le déshonneur et dans l’indignité.

Roger Gbégnonvi


Partager

Articles similaires

[Chronique Roger Gbégnonvi]: Usage du progrès à contre-sens par les Béninois

Venance TONONGBE

Pourquoi le Covid-19 ne l’emportera pas [Chronique Roger Gbégnonvi]

Venance TONONGBE

Etat et Citoyen au contrôle de la démographie du Bénin

Venance TONONGBE

1 Commentaire

fréds H. janvier 22, 2019 at 3:20

Je valide professeur.

Reply

Laissez un commentaire

You cannot copy content of this page